QUI A DIT QUE PLUS ÉCOLOGIQUE, PLUS PRATIQUE  ET MOINS CHER ÉTAIT IMPOSSIBLE ? - <p>Chantier Keller Fondations avec essai du coffrage Pontoisien à Marseille</p>
05/07/2022

QUI A DIT QUE PLUS ÉCOLOGIQUE, PLUS PRATIQUE ET MOINS CHER ÉTAIT IMPOSSIBLE ?


Paroi de pieu séquent pour ouvrage GC
Murette de guide faite au coffrage polystyrène sur le chantier Keller Fondations à Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis).
Ouvrier pied de mât et foreuse tarière creuse en travail.
Excavateur de polystyrène en action.
Essai des coffrages pontoisiens posés dans la tranchée pendant le coulage du béton sur un chantier du Prado à Marseille

Les génies civilistes disent souvent qu’on peut « construire n’importe quoi, n’importe où, c’est juste une question de moyens », et ils ont su le prouver. Le marché de la construction est énorme, touche tous les pays, possède des ressources humaines et matérielles considérables, et il est en constante recherche d’innovation.

Malgré tout, la prise de conscience est là : les réglementations mesurent l’empreinte carbone des constructions et montrent que des incohérences sont rectifiables, ce qui peut optimiser à la fois les ressources humaines, écologiques, matérielles, financières, la sécurité, ainsi que les ambitions créatives de chacun. Avant d’évoquer l’une de ces incohérences, il est nécessaire de présenter l’ouvrage qui la concerne.

 

LA PAROI DE PIEUX SÉCANTS, UN OUVRAGE QUI N’ATTENDAIT QU’UNE CHOSE : SA RÉVOLUTION ÉCOLOGIQUE

 

La méthode a été importée en France depuis le Benelux au début des années 2000  ; elle a pour fonction le soutènement des terres. Elle comporte des alignements de pieux verticaux de 2 types : pieux dits «primaires» en béton maigre, pieux dits «secondaires» en béton armé. Les seconds reforant en partie les premiers afin d’assurer une continuité latérale de matière, ainsi que son étanchéité. La surface décaissée peut aller, en foreuse double rotation, jusqu’à 9,5 m de profondeur (3 niveaux souterrains) et jusqu’à 11 m (4 niveaux souterrains) en tarière creuse. Une fois décaissés et nettoyés, les pieux peuvent être travaillés. Un lissage peut être effectué, mais une paroi bien réalisée est aussi très satisfaisante visuellement.

 

Pour obtenir un résultat propre il va falloir s’aider, car quand un pieu de paroi n’est pas réalisé exactement à l’endroit prévu, cela entraîne du temps de réflexion ainsi que des réajustements pouvant aller jusqu’à la réorganisation du planning chantier, voire causer de gros problèmes d’étanchéité, et l’on imagine ce que peut entraîner l’oubli d’un pieu… Le problème de l’implantation est réglé depuis quelques années déjà  ; les stations robotisées de précision millimétriques sont devenues monnaie courante. La difficulté est de garder cette précision entre le moment où le géomètre implante le pieu et la fin du forage de ce dernier. Pour pallier cette difficulté, les entreprises de fondations spéciales ont conçu des murettes de guide.

 

LA MURETTE DE GUIDE : UNE AIDE AU FORAGE TRÈS UTILE MAIS ACTUELLEMENT GOURMANDE EN POLYSTYRÈNE

 

Le procédé est simple, le pelleur fait une tranchée de la hauteur de la murette, s’ensuit la pose des cylindres en polystyrène et enfin le coulage béton de la murette où un léger ferraillage est nécessaire. Ce petit ouvrage permet ainsi de garder une implantation intacte malgré de fortes coactivités mais aussi de garder le contrôle sur l’altimétrie de la plateforme. L’autre effet positif qu’apporte la murette, est d’éloigner l’ouvrier pied de machine (co-pilote) de la zone à risque car il n’a plus besoin de positionner et repositionner la foreuse et cela entraîne donc une augmentation des cadences.

 

Il y a déjà quelques années que ce procédé existe. Auparavant, on forait tout simplement dans le polystyrène. Aujourd’hui les normes environnementales sont importantes, leur application est contrôlée et elles sont représentées par le CSPS (coordinateur sécurité protection santé) choisi par le maître d’ouvrage. Des organismes extérieurs, ayant aussi un pouvoir de sanction important, sont de plus en plus présents (Cramif, Inspection du travail, etc.), et le client peut aussi avoir ses propres exigences. Ces autorités ont récemment décidé, à juste titre, de faire la guerre au polystyrène. Nous allons voir que cela peut demander beaucoup d’énergie.

 

INCONVÉNIENTS DU COFFRAGE POLYSTYRÈNE

 

Comme dit précédemment, il est maintenant impossible ou très risqué de forer directement dans les coffrages polystyrène, car cela peut créer beaucoup de déchets polluants ; il faut donc les retirer. Pour cela, certaines entreprises de fondations spéciales ont conçu des excavateurs de polystyrène, dont le fonctionnement est comparable à certains types de tire-bouchons.

Cela mobilise du temps, du personnel, du matériel et comporte de nombreuses situations à risques. L’énergie nécessaire à l’excavation du polystyrène est supérieure à celle de sa production, et la proximité des ouvriers lors de la manutention s’avère risquée (éclats de métal ou de pierres possibles, la mise en tension des chaînes de levage ainsi que surexploitation des manilles). Suite à son excavation, le polystyrène est transporté jusqu’à une benne de tri, elle-même envoyée en centre de tri. Un bilan carbone, sécurité et financier désastreux pour ce produit qui a néanmoins des propriétés techniques remarquables pour la réalisation des murettes de guide.

 

COMMENT TROUVER UNE SOLUTION ENVIRONNEMENTALE SANS APPORTER D’AUTRES PROBLÉMATIQUES ?

 

C’est ce à quoi répond ADB System, entreprise de recherche et développement en génie civil, implantée à Pontoise, capitale du Vexin français. Elle propose le CO.PO (COffrage POntoisien), un coffrage organique pour murettes de guide de paroi de pieux sécants.

L’entreprise Véliocasse, mise sur la revalorisation des résidus de l’agriculture du lin et de ceux de l’industrie de la métallurgie. Afin de minimiser les erreurs de forage, elle ajoute un code couleur afin de pouvoir repérer à tout moment l’implantation des pieux primaires/secondaires, une aide visuelle qui sécurise le phasage. «Nous sommes conscients que le plastique et ses dérivés ont des propriétés techniques incroyables, mais en abuser nous est nocif. Nos recherches montrent qu’il est possible de corriger cette incohérence écologique tout en préservant le progrès technique et les cadences. Afin de répondre correctement à la problématique il a fallu travailler avec des ressources de qualités, proches et disponibles en grande quantité. Par chance, la banlieue en est remplie», Adrien Hémet, fondateur ADB System.

 

LE LIN : LA MATIÈRE PREMIÈRE AUX PROPRIÉTÉS INCROYABLES

 

Le lin c’est la fibre textile végétale la plus solide au monde, et il pousse uniquement entre Caen et Amsterdam. Un climat et une géologie bien particuliers sont nécessaires. Là, le lin du Vexin y pousse particulièrement bien ; sa fibre et sa graine son très prisées sur les marchés agricoles et textiles ; sa paille/ ana, quant à elle, sert principalement de litière de luxe pour chevaux. C’est un matériau avec de nobles propriétés, désormais utilisé comme l’un des composants principaux du CO.PO. 

 

LE LAITIER, UN EXEMPLE DE TRANSITION ÉCOLOGIQUE

 

J’ai immédiatement été séduit par le caractère innovant de ce concept et prescrire une solution Ecocem m’a paru naturel et évident pour produire cette nouvelle génération de coffrage, respectueux de notre environnement», Philippe Malfait, responsable prescription nationale. Le laitier moulu est un liant hydraulique bas carbone, issu de l’économie circulaire. La matière première, le laitier haut-fourneau  est un co-produit de la production de la fonte. Ecocem le récupère dans ses usines de Fos-sur-Mer et de Dunkerque, le broie très finement et le sèche afin d’obtenir un laitier moulu de haute qualité.  Le laitier moulu peut aider les acteurs de la construction à décarboner de manière efficace et à construire un avenir plus durable.

 

Une chose est sûre, la paroi de pieux sécant est amenée à se développer, elle est rapide, efficace et maintenant beaucoup plus propre. Le pieu ne pourra évidemment pas répondre aux marchés monstrueux auxquels répond la paroi moulée mais c’est une très bonne solution pour les ouvrages aux dimensions vu précédemment. Pour ça : une foreuse (simple ou double table)  ; une pompe à béton  ; une murette de guide avec des coffrages pontoisiens et évidemment une équipe compétente afin d’injecter le plus rapidement et le plus proprement le béton. Le tout évidemment en sécurité.

 

Paule Ortoli