NAISSANCE DE TESTIMONIO II À MONACO
01/11/2018

NAISSANCE DE TESTIMONIO II À MONACO


La chantier Testimonio II qui mixeraappartements, parkings, crèche, école…







Depuis 2016, les équipes de Soletanche SAM, filiale locale de Soletanche Bachy, Vinci Construction Monaco et GTM Sud ont engagé, en partenariat avec les entreprises Caroli Bat et Caroli TP, les travaux du projet Testimonio II. Un site présentant, comme toujours à Monaco, des contraintes exceptionnelles : très forte déclivité, emprises réduites, et hydrogéologie et géotechnique extrêmement complexes.

Après un concours lancé en 2013, le groupement de promoteurs Groupe Marzocco et Vinci Immobilier a été retenu pour construire 150 logements dans une tour de 25 étages, 1 100 places de parking, une crèche de 50 berceaux, et l’ISM – International School of Monaco –, actuellement à l’étroit dans ses locaux du quai Antoine-1er, et qui pourra accueillir 700 élèves.
L’ensemble se situe entre le boulevard d’Italie, situé à la cote 44 NGM, et l’avenue Princesse-Grace à 6 NGM, et englobe donc le boulevard du Larvotto. Les terrassements, fondations profondes, soutènements, et le gros oeuvre (macro-lot 1), ont été confiés par les promoteurs à un groupement d’entreprises de Vinci Construction. Les travaux préparatoires ont démarré en 2016 et les logements privés devraient être livrés au macro-lot 2 en charge des CES en 2021.

 

LA CONCEPTION DU PROJET

Spécificités de la « Grande Fouille »


L’ouvrage, dans la zone dite de la « Grande Fouille », prend la forme d’un très grand socle qui abritera notamment un parking et sur lequel sera bâtie la tour. Il s’installe dans une topographie naturelle faite d’une succession de talus et de murs, et dont le dénivelé est de 40 m au total.
Ce socle est conçu pour être entièrement autostable sous l’effet de la poussée du massif de terre amont (y compris au séisme), sans aucun tirant. Les éléments stabilisateurs ne sont donc constitués que par l’enceinte périphérique en parois moulées et contreforts (en forme de U), et les barrettes intérieures, orientées principalement dans le sens amont-aval.
L’une des difficultés de la conception consiste à trouver le moyen de conférer suffisamment d’inertie
à cette structure composée de panneaux de paroi jointifs et de barrettes discontinues pour que
son déplacement soit compatible avec les seuils de tassement sous les immeubles voisins. L’excavation est menée « en taupe », avec coulage des dalles à l’avancement, ce qui permet de rigidifier la boîte au fur et à mesure de sa construction.

Les dispositions suivantes sont également mises en oeuvre :

  • certains panneaux de paroi moulée (amont-aval) sont « remordus » entre eux (l’Hydrofraise vient forer directement le béton du panneau précédent) ; cette technique assure un contact rugueux avec un frottement mobilisable amélioré par rapport à un joint waterstop.
    De plus, au sein d’un même panneau, les différentes cages d’armatures sont liaisonnées horizontalement pour bénéficier de l’inertie maximale) ;
  • les barrettes intérieures, au fur et à mesure des terrassements, sont clavées entre elles et liaisonnées dans le sens amont-aval afin de constituer de longs refends aux armatures continues.

Compte tenu de ce dernier point, le concepteur se trouve donc face à une structure dont l’inertie sera
variable en fonction des phases de travaux. De plus, la mobilisation de la butée devant les contreforts
et barrettes implique des déplacements sous les niveaux de terrassements : les dalles de l’infrastructure sont donc coulées sur une enceinte qui se déforme progressivement.
Afin de rendre compte de la répartition des efforts entre les différents éléments (panneaux de paroi,
contreforts, barrettes), l’idéal est, bien sûr, d’avoir recours à un modèle 3D, de la structure aux éléments finis. Mais, chose plus rare, il est indispensable dans le cas présent d’intégrer à ce modèle le phasage complet de la construction puisque son effet est prépondérant et ne peut être appréhendé de
façon simplifiée. En parallèle de la modélisation purement structurelle, un autre modèle 3D aux éléments finis a été initié, privilégiant cette fois les aspects géotechniques pour déterminer au plus juste les poussées exercées tout autour de l’enceinte, ainsi que les tassements aux abords du projet.

 

La zone « Aval Florida »


Relativement indépendante de la « Grande Fouille », la conception et la réalisation du bâtiment situé en aval de la Villa Florida représentent peut-être le plus grand défi technique du projet. Dans cette zone, en effet, le projet prend place sur une étroite bande de terre de 25 m de largeur, dans laquelle s’inscrivent un talus naturel très raide (sur 20 m de hauteur), et le boulevard du Larvotto soutenu par le
mur Rocabella tiranté sur 15 m. Au total, 35 m environ séparent donc le niveau de la Villa et le fond de
fouille.
Sur cette hauteur, le bâtiment définitif doit être autostable, car l’utilisation des tréfonds sous la Villa n’a
été accordée que pour mettre en oeuvre des ancrages provisoires.
Les entreprises se sont donc appliquées à trouver une conception s’affranchissant de la paroi moulée.
Il a été décidé de privilégier une solution découplant le soutènement provisoire et le bâtiment. L’excavation se fait à l’abri de deux soutènements étagés :

  • en partie supérieure, là où la solution naturelle à Monaco serait une microberlinoise, un voile cloué de 10 m de hauteur s’est imposé, compte tenu de l’impossibilité d’accéder en crête de talus avec une machine de forage de micropieux. Afin de respecter les critères de tassements sous le mitoyen, les clous de 15 m ont été munis d’une partie libre de 6 m et précontraints.
  • cette paroi clouée permet de dégager dans le talus une plateforme de 10 m de largeur environ,
    suffisante pour installer une foreuse de pieux. Le soutènement inférieur est donc constitué par une paroi lutécienne en pieux de 1 m de diamètre, espacés tous les 2,4 m. Les pieux sont prolongés par une rehausse en béton armé jusqu’à mi-hauteur du voile cloué, afin de pouvoir intégrer des tirants longs en partie supérieure. Au total, la stabilité de cette lutécienne est assurée par l’ancrage de 12 lignes de tirants, dont la moitié scellées dans le substratum.

La longueur maximale pour les tirants supérieurs est de 42 m, et jusqu’à 50 m pour les tirants ancrés dans le rocher !
Concernant l’équilibre de la structure en phase de service : un voile béton armé de 60 cm est coulé devant la lutécienne provisoire et permet de contreventer le bâtiment sous séisme. Par ailleurs, la section de pieux n’étant pas suffisante pour reprendre les tractions voulues vis-à-vis du renversement amont-aval, une file de barrettes de fondations a été ajoutée en amont à l’aplomb des refends du bâtiment.

 

LES TRAVAUX


Les projets à Monaco comportent, de façon quasi systématique, une part de logistique et de travaux préparatoires ou d’ouvrages provisoires nécessaires à la construction. Le projet Testimonio II n’y coupe pas, avec, notamment, la construction d’un pont provisoire pour dévoyer, le temps des travaux, le boulevard du Larvotto, situé en plein milieu du projet et la construction d’une galerie drainante en traditionnel pour tenter de collecter les eaux de source traversant le projet.
Depuis le mois d’août 2017, ce sont les terrassements, les soutènements et les fondations profondes réalisées par les équipes de Soletanche SAM qui constituent l’activité principale. Les travaux de génie civil sont en cours de lancement, avec la construction de la dalle de transfert. Compte tenu de la géométrie du site, de sa très grande déclivité (près de 40 m sur une plateforme de parfois 30 m de largeur à peine), de la géologie monégasque complexe et chahutée (grosse frange d’éboulis à blocs de calcaire jurassique sur un substratum de marno-calcaire crétacé, le tout entrecoupé de 2 paléo-talwegs très ouverts), le projet constitue l’abc des travaux spéciaux, avec un éventail de spécialités particulièrement riche qui fait le bonheur de tous les spécialistes.
Sont ou seront ainsi réalisés sur site, des parois moulées et barrettes à l’Hydrofraise, des soutènements de tous types (berlinoise tirantée, microberlinoise tirantée ou butonnée, mur cloué…), des injections de sol, des pieux de fondations, des micropieux, et même des sondes géothermiques profondes. L’ensemble de ces travaux est réalisé dans un cadre urbain extrêmement dense avec des ouvrages mitoyens occupés, très sensibles et de grande hauteur, en périphérie immédiate du projet. Cela impacte l’organisation du chantier de façon très particulière en exigeant une gestion des nuisances (vibrations, bruit, environnement ...) permanente.

 

LES ÉTAPES DU PROJET


Il est difficile de décrire sans modèle 3D le phasage de construction de cette opération, tant il est
complexe. Cette complexité repose sur les éléments de géométrie du site évoqués plus avant et
dont il est nécessaire de s’affranchir pour livrer les ouvrages aux dates contractuelles. C’est pour
cette raison que le projet a été « découpé » en 2 grandes zones : la première dite de la « Grande
Fouille », et la seconde dite de « L’Aval Florida ».

 

La Grande Fouille


Concernant les travaux spéciaux, cette zone se caractérise par la réalisation d’un soutènement principal de près de 40 m de hauteur, réalisé depuis 2 niveaux de plateformes différents (44 et 30 NGM ). Il s’agit d’une paroi moulée à l’Hydrofraise, de 1 m d’épaisseur, et jusqu’à 50 m de profondeur environ, stabilisée par des barrettes et contreforts d’épaisseur 1 m allant jusqu’à 61 m de profondeur, et les planchers du parking qui sera réalisé en semi-taupe. Ces barrettes servent aussi de fondation à la tour de 25 étages.
Pour réaliser ces parois, des travaux de soutènements provisoires ont été réalisés avec une microberlinoise le long du boulevard d’Italie, des talus cloués avec des clous en fibre de verre pour éviter de gêner la réalisation des futures barrettes, une microberlinoise au-dessus du boulevard du Larvotto, pour permettre de placer la centrale de fabrication et de recyclage des boues des parois moulées.
En complément, des travaux de pré-injection nécessaires à la réalisation des parois moulées sont réalisés préalablement à celles-ci, et des pieux viendront fonder l’école internationale.
Il est à noter que, afin d’optimiser la consommation énergétique des bâtiments, les fiches des pieux et
barrettes sont équipées de tubes géothermiques qui seront complétés par des sondes géothermiques
profondes (environ 180 m de profondeur). L’ensemble sera connecté, via des réseaux circulant
sous radier, à une pompe à chaleur.

 

« L’Aval Florida »


Cette zone se caractérise par un soutènement vertical de près de 35 m de hauteur. Pour le réaliser,
se succèdent de haut en bas un mur cloué de 8 m de hauteur, une berlinoise tirantée et sa rehausse,
et, en fond de fouille, des barrettes de fondation du futur bâtiment et des barrettes de traction pour
reprendre les efforts de renversement en phase définitive.

 

LES MOYENS ENGAGÉS


Pour réaliser ces travaux, Soletanche Bachy a mobilisé les outillages les plus perfomants de dernière
génération.

Forage des parois moulées : benne KS et Hydrofraise Evolution 7. Cette Hydrofraise, dernière-née du parc matériel de Soletanche Bachy, présente la particularité de développer
une très grande puissance de perforation avec un ensemble relativement compact, ce qui est essentiel compte tenu de la petite taille des emprises. Cette Hydrofraise est par ailleurs équipée des systèmes de mesure et de contrôle des déviations permettant de maîtriser la verticalité, y compris dans les éboulis de pente.

Équipement des parois moulées : le design des parois moulées et barrettes a exigé que les cages
des panneaux soient liaisonnées toute hauteur. Pour cette raison, il faut être en mesure de lever des
cages jusqu’à 60 m de hauteur, pesant plus de 60 t. Il a fallu pour cela recourir à une grue de 400 t,
avec plus de 70 m de flèche.

Boues pour parois moulées : une centrale avec plus de 1 300 m3 de stock, un Sotress de 450 m3/h et une unité de destruction des boues ont été mis en place.
Forage pour micropieux et préinjection : jusqu’à 4 foreuses Hi’Drill ont été mobilisées pour ces travaux.
Pieux : les pieux de fondation du pont provisoire ont été réalisés en pieux Starsol. Les pieux berlinois
dans les éboulis sont, quant à eux, réalisés à l’aide d’une foreuse Maït 420.
Pour faire tourner tous ces ateliers, très souvent en coactivité, ce sont 45 à 60 personnes qui sont mobilisées en poste. Elles sont encadrées par un conducteur de travaux et un ingénieur travaux, eux-mêmes secondés par 2 RCI et 3 chefs de postes.

 

Pierre de Lavernée, ingénieur
principal, bureau d’études
Soletanche Bachy France
Emmanuel Ollier, administrateur
délégué de Soletanche SAM