NOUVELLE GOUVERNANCE DU BN TRA
01/04/2019

NOUVELLE GOUVERNANCE DU BN TRA




Le Bureau de normalisation des transports, des routes et de leurs aménagements (BN TRA) est l’instance placée sous l’égide du Cerema qui est en charge, par délégation de l’Afnor, de la gestion d’un certain nombre de normes du domaine de la construction, et plus particulièrement des travaux publics. L’effectif propre au BN TRA est restreint, mais il a le soutien d’autres instances – principalement du Cerema – pour assurer le secrétariat de toutes les commissions dont il a la charge.

Les experts en charge du suivi des normes sont en effet regroupés au sein de commissions de normalisation, au nombre de 37 au sein du BN TRA. Ce suivi comporte les missions suivantes : être le groupe miroir pour la France des Technical Committees du CEN et de l’ISO, et faire vivre (c’est-à-dire créer, réviser et annuler) les normes françaises du même domaine.
Plusieurs commissions de normalisation peuvent avoir des sujets communs ou convergents ; ont
donc été créés des groupes de coordination pour favoriser les échanges et traiter les interfaces entre comités.
Cinq commissions sont rattachées au domaine géotechnique :
PAB (équipements de protection pare-avalanches et pare-blocs), GSY (géosynthétiques), JOG
(justification des ouvrages géotechniques), ETG (exécution des travaux géotechniques) et REG
(reconnaissance et essais géotechniques). Il est d’usage que la CNT (terrassements) participe aux
travaux du groupe de coordination géotechnique.

 

POURQUOI UNE NOUVELLE GOUVERNANCE ?


Il n’est pas inutile de rappeler en liminaire que l’Afnor anime les commissions en charge du suivi des normes en faisant participer financièrement ses bénéficiaires (par exemple, dans le cas courant,
les industriels qui souhaitent collectivement voir reconnus leurs produits) ; sans vouloir entrer dans
le détail, on signalera cependant que les règles des droits de siège sont un peu plus complexes.
Historiquement, l’État était considéré comme le principal bénéficiaire et assumait à ce titre la
charge financière du BN TRA (la participation des experts était gratuite, quelle que soit leur origine) ; ce cas n’est pas isolé : on peut citer celui de la FFB qui supporte financièrement le BN TEC (pour simplifier, en charge des DTU).
L’État a décidé de se désengager partiellement de ce mode de fonctionnement et de demander que les autres parties prenantes participent au financement du BN TRA. Il a été convenu qu’en contrepartie, ces autres parties participeraient aux décisions que le BN TRA pouvait être amené à prendre : par exemple, la création ou suppression de commissions, les actions à entreprendre (en particulier la participation à des secrétariats de Technical Committee), l’élaboration du budget, etc.
La « nouvelle gouvernance » est la traduction de cette double évolution : financière (pour les participants aux commissions) et organisationnelle (pour le BN TRA en tant qu’entité).

 

L’ÉVOLUTION FINANCIÈRE


Toute personne qui souhaite participer à la vie des normes est assujettie à un droit de siège depuis le 1er janvier. Il existe de nombreux cas d’exemptions : les experts indépendants, les experts des entreprises de moins de 250 personnes (PME), les représentants du réseau scientifique et technique (par exemple, Ifsttar en tant qu’établissement public scientifique et technique), etc. Pour les autres, les tarifs varient essentiellement selon le nombre d’experts désignés. Cette règle a pour effet de stimuler les représentations syndicales et professionnelles en lieu et place d’experts représentants

« seulement » leurs entreprises. On peut supposer que cela aura pour effet de déplacer vers les syndicats, unions ou fédérations certaines discussions.
Il peut être également utile de rappeler que les experts qui participent à la normalisation européenne ou ISO sont nommés par la commission dont ils sont issus : un expert international est donc assujetti au droit de siège de son groupe miroir, même s’il ne participe pas aux activités de ce groupe.
Cette métamorphose profonde a les conséquences que l’on peut imaginer : certains experts ou instances ont renoncé à participer, et l’inertie dans l’établissement de nouveaux postes budgétaires de certaines instances risque d’être préjudiciable à la continuité du travail en commission.
Le président de commission que je suis s’interroge :

  • Y aura-t-il encore assez d’experts pour représenter la France dans les groupes de travail européens, où tout se décide ?
  • Le panel d’experts en commission sera-t-il encore suffisant pour qu’il soit représentatif de toutes les composantes de la profession ?
  • Le renouvellement des experts (avec la perte d’expérience dans la rédaction des normes et la perte de la connaissance historique du contenu des normes) ne sera-t-il pas trop brutal ?
  • Comment gérer un « non-consensus » qui opposerait un expert indépendant isolé face à une unanimité de représentants collectifs ?

 

LA CRÉATION DU COMITÉ DE PILOTAGE DE LA STRATÉGIE DU BN TRA (COPIST)


L’organe de direction et de pilotage du BN TRA s’appelait Codir; avec la nouvelle gouvernance, c’est désormais le CoPiSt. Les représentants dans l’ancien Codir (ministères et établissements publics intéressés) se trouvent désormais dans le collège 1 du CoPiSt ; ce sont des membres nommés.
Le collège 2 assure avec 8 mem-bres la représentation :

  • des syndicats professionnels, fédérations professionnelles ou associations, de tous les domaines dans le champ du BN TRA ;
  • des grandes entreprises et entreprises intermédiaires ;
  • des PME et entrepreneurs individuels.

En outre, le collège doit assurer la présence d’au moins un membre issu des PME et entrepreneurs individuels ; de chacun des domaines d’activité du BN TRA ; du domaine présentant le plus grand nombre de normes en stock ; du domaine présentant le plus grand nombre de normes en flux.
Enfin, le collège est élu par les experts actifs au BN TRA sur des listes bloquées respectant ces
critères.
Il semble acquis que 2019 sera une année de rodage, tant vis-à-vis des missions confiées à ce CoPiSt, que des questions soulevées par la nouvelle gouvernance.

 

CONCLUSION


Les normes restent les normes, et il faut que chacun se mobilise pour que la nouvelle gouvernance soit sans effet sur celles-ci, particulièrement lorsqu’elles sont issues d’instances internationales. Cette nouvelle gouvernance est aussi une opportunité à saisir pour renouveler notre approche de la normalisation et mobiliser de nouvelles forces jusqu’à présent insuffisamment présentes.
Cependant, les experts sont une denrée rare et désormais doublement coûteuse (puisque le droit de siège s’ajoute aux salaires, charges et frais de l’expert). Une réflexion doit sans doute s’établir pour concentrer les normes d’un domaine sous une seule instance. Les règles sont posées pour les années à venir, mais cela ne doit pas empêcher la remontée des dysfonctionnements constatés et des améliorations potentielles ; parlez-en à vos instances représentatives pour que les nécessaires adaptations soient mises en oeuvre dans les meilleures conditions.

 

Jean-Paul Volcke
Franki Fondation (groupe Fayat)