Le projet de la ligne 15 sud prévoit, dans le secteur de Saint-Maur-des-Fossés, la réalisation d’ouvrages dans les Argiles Plastiques et la craie campanienne. Après les premières
campagnes de reconnaissance entreprises par des moyens classiques d’investigation (sondages, essais en laboratoire), il subsistait un besoin d’information afin de mieux caractériser les formations yprésiennes rencontrées au droit du projet, d’évaluer leur aptitude au traitement par jet-grouting et de tester les méthodes d’excavation en souterrain envisageables au sein des argiles.
Il a donc été décidé de reconnaître ces terrains par la réalisation d’un puits et d’une galerie de reconnaissance afin :
• de mieux caractériser les formations Yprésiennes (Fausses Glaises et Argiles Plastiques) rencontrées au droit du projet ;
• d’évaluer leur aptitude au traitement par jet-grouting ;
• de tester les méthodes d’excavation en souterrain envisageables au sein des argiles..
Ces essais géotechniques ont été réalisés le long de la Marne, sur la commune de Saint-Maur-des-
Fossés, à proximité immédiate des ouvrages projetés.
Le marché de reconnaissance, confié à Soletanche Bachy et Bouygues TP, comprenait :
L’objectif de ces essais était multiple :
Afin d’appréhender au mieux le résultat de ces reconnaissances, une auscultation renforcée du site a été mise en place :
Le radier du puits a également été instrumenté. Du polystyrène a été disposé sous toute la surface du radier pour plafonner les contraintes qui pourraient s’appliquer. L’instrumentation a été placée à deux endroits du radier, au centre et plus près de la paroi. À chaque emplacement, 3 types d’instruments ont été posés :
L’instrumentation ainsi définie devait permettre de :
Le résultat des mesures, entaché d’incohérence, n’a malheureusement pas permis de conclure.
MESURE DU RESSERREMENT DES ARGILES PLASTIQUES APRÈS L’EXCAVATION D’UN PANNEAU DE PAROI MOULÉE
Dans le cadre des travaux du puits de reconnaissance, il a été réalisé lors de l’excavation de la paroi moulée circulaire, une campagne de mesures par ultrasons par le dispositif Koden afin d’observer un éventuel resserrement des Argiles Plastiques après l’excavation.
Le principe de la méthode est de mesurer le temps d’aller-retour des ultrasons (principe du sonar). Les ultrasons émis par une sonde se réfléchissent sur la paroi et reviennent à leur point de départ ;
connaissant le temps séparant l’émission de l’onde et la réception de l’écho et la vitesse de
l’ultrason dans la boue, il est possible d’en déduire la distance séparant l’émetteur de la paroi.
Les mesures ont été réalisées sur 2 panneaux de la paroi. Les caractéristiques géométriques d’un panneau sont : 2,70 m (L) x 80 cm (Epaisseur) x 37 m (P).
Lorsque l’excavation du panneau est terminée, l’appareil est positionné et centré sur celui-ci. Il est alors réalisé un étalonnage de la mesure entre les murettes guides. Le capteur à ultrasons est ensuite descendu le long de l’excavation pour effectuer la mesure. Pendant la descente, la distance entre le capteur et les 2 parois opposées est mesurée en continu et imprimée en temps réel sur papier. Ceci permet de déterminer la largeur exacte ainsi que les irrégularités des parois du forage et de les représenter.
L’incertitude des mesures est de l’ordre de ± 2 cm sur la largeur du panneau et de ± 10 cm sur la profondeur.
Cette campagne a permis de mettre en avant plusieurs points :
LE PLOT D’ESSAIS DE JET-GROUTING DANS LES ARGILES PLASTIQUES
Le plot d’essai de jet-grouting a consisté en la réalisation de 3 colonnes d’essais en jet triple dans les Argiles Plastiques entre 17 et 27 m de profondeur. Les colonnes ont été réalisées avec une énergie constante de 112 MJ/ml, au centre du puits circulaire en paroi moulée de 7 m de diamètre.
Préalablement aux travaux de jet-grouting, une campagne de reconnaissance complémentaire a été
réalisée. Elle a notamment consisté en la réalisation d’un sondage carotté, d’un sondage pressiométrique et d’un sondage CPT. Des essais en laboratoire ont été réalisés sur les échantillons prélevés. Un piézomètre de 44 m équipait le site.
Pour chaque colonne, les déviations de forage ont été mesurées. 2 carottages de contrôle ont été faits au niveau du point triple et d’un point double.
Durant la réalisation des colonnes, divers contrôles ont été menés :
Aucune mesure pour l’estimation du diamètre n’a été réalisée sur les différentes colonnes, celles-ci étant exposées lors du terrassement du puits jusqu’à une profondeur de 25 m environ.
Le diamètre moyen observé des colonnes était de l’ordre de 100 cm avec des variations comprises entre 90 et 110 cm.
La proportion de morceaux d’argile présents dans la colonne augmentait avec la profondeur. Au point qu’il devient difficile de distinguer les colonnes en fond de puits. On passait d’une colonne constituée de coulis quasi pur en partie supérieure à une colonne constituée essentiellement de morceaux
d’argile en partie inférieure (au-delà de 23 m). Ceci peut s’expliquer par la décantation des copeaux d’argile formés lors de la phase de jetting.
Les morceaux d’argile sont de l’ordre du centimètre. Mais nous n’avons pas constaté de noyau d’argile emprisonné au centre du triplet.
Le graphique ci-dessous représente le fuseau énergie-diamètre qui semble pouvoir s’appliquer dans les Argiles Plastiques dont la compacité correspond à des pressions limites de l’ordre de 1 à 1,5 MPa.
Le tableau suivant reprend les valeurs de résistance à la compression obtenues sur les échantillons de carotte (en MPa). Les valeurs correspondent à un âge d’environ 120 jours (4 mois). Les carottages ont été réalisés en 140 mm de diamètre, puis recarottés en 48 mm de diamètre avant écrasement.
On constate des résistances assez faibles, probablement à cause des nombreuses inclusions d’argile. Les essais d’écrasement ont été réalisés sur des carottes de 48 mm ; à l’échelle de la colonne, la résistance serait plus importante. Les résultats sont aussi très dispersés, ce qui est assez caractéristique du jet triple (mauvaise homogénéité des colonnes).
LA GALERIE D’ESSAI DANS LES ARGILES PLASTIQUES
Suite à l’exécution du puits, l’excavation de la galerie a été réalisée avec des pas d’excavation de
1 m avec pose de soutènement provisoire composé de cintre HEB140 et de béton projeté de
14 cm d’épaisseur.
Le front de taille de la galerie d’excavation a été renforcé par des boulons en fibre de verre (10 boulons de 14 ml espacés avec une maille de 1 m x 1 m). Ils sont composés chacun d’une barre de Durglass Flat Bars de section
40 mm x 9 mm, mise en place depuis le puits, avant la démolition de la paroi moulée.
Il était prévu de réaliser une rétro-analyse et un recalage du modèle géotechnique reflétant le comportement des Argiles Plastiques, les résultats d’auscultation devant permettre d’évaluer les paramètres mécaniques des Argiles Plastiques en effectuant une analyse en retour par calage des modèles de calcul aux observations faites in situ.
Mais, le 21 décembre 2015, l’excavation de la galerie a dû être suspendue suite à une instabilité en voûte, et son excavation n’a pas été poursuivie au-delà de la 4e passe d’excavation.
La rétro-analyse a toutefois été menée par Terrasol, mais uniquement sur les mouvements mesurés avant l’interruption du creusement, le modèle aux éléments finis bâtis pour cette étude ne permettant pas de prendre en compte la formation de la cloche, ni de caler les déformations survenues après l’arrêt du creusement.
Il subsistait de trop grandes incertitudes, en particulier sur le volume réel de la cloche et le pourcentage de vide restant après les injections pour mener une modélisation de remontée de fontis, qui aurait conduit inévitablement à un calage aléatoire.
En conséquence, seules les séries de mesures suivantes ont été prises en compte :
Le plan ci-dessous représente la position des différents éléments d’auscultation pris en compte dans la rétro-analyse.
CONCLUSIONS À TIRER
Tout d’abord, le resserrement marqué des Argiles Plastiques dans le forage de la paroi moulée rend indispensable un curage soigné effectué avant le bétonnage du panneau. Ensuite, concernant le plot d’essai de jet-grouting dans les Argiles Plastiques, la réalisation des colonnes en séquence primaire-secondaire demande un temps de prise d’au moins 2 jours entre la réalisation d’une colonne et la colonne adjacente. En effet, du jour au lendemain, les colonnes n’ont pas le temps de monter en résistance. Ainsi, lorsque l’on réalise la colonne adjacente, le jet peut éroder de manière importante la colonne réalisée la veille : il en résulte une baisse des résistances.
L’augmentation de la pression de mise en oeuvre du coulis doit permettre de diminuer l’hétérogénéité de la colonne. Une pression de l’ordre de 60-80 bar serait sans doute mieux adaptée pour des diamètres de l’ordre du mètre.
L’augmentation du dosage en ciment du coulis permet d’augmenter la résistance de la matrice cimentaire dans la colonne et ainsi atteindre des valeurs de l’ordre de 5 MPa, ceci malgré la présence d’inclusions d’argiles. Le dosage du coulis est à définir en fonction des paramètres mis en oeuvre et serait à mettre au point à l’occasion d’un plot d’essai complémentaire.
Enfin, des échantillons de plus grande taille auraient permis de limiter les effets d’échelle lors des écrasements (inclusion argileuse).
Le jet triple présente des avantages dans ce type de terrain, tels qu’une économie de ciment et une remontée plus aisée du spoil. Mais il présente aussi des inconvénients, tels qu’une colonne pas aussi homogène qu’en jet double ou en jet simple ; les « copeaux » d’argile ont davantage tendance à sédimenter ; et plus de spoil produit (eau + coulis).
À l’occasion de travaux de plus grande ampleur, un plot d’essai serait indispensable afin de tester d’autres énergies et ainsi affiner la courbe énergie/diamètre, et aussi afin de tester le jet double avec pré-jet et apprécier la différence d’homogénéité des colonnes par carottage.
L’excavation de la galerie n’a malheureusement pas pu être menée à son terme. Des éboulements importants se sont produits à l’abord du 4e cintre de soutènement. Des morceaux d’argile, d’une dizaine de centimètres de côté, se détachaient régulièrement du ciel de la galerie. Un pré-soutènement semble indispensable pour excaver ce type de terrain en toute sécurité.
La comparaison des déformations du terrain (tassements et extrusion du front de taille) avec le résultat de calculs, utilisant différents paramètres des Argiles Plastiques supérieures, a permis de recaler le modèle géotechnique. À noter qu’ici les Argiles Plastiques sont en contact direct avec les alluvions de la Marne et présentent des caractéristiques mécaniques plus faibles que sur d’autres sites, lorsqu’elles sont protégées par une dalle de Calcaire Grossier.
Le tableau ci-dessus récapitule les paramètres retenus suite à cette étude.
Paramètres retenus pour la modélisation de la couche des Argiles Plastiques supérieures.
Ce recalage est à prendre avec beaucoup de précautions, car il n’est réalisé que sur les 4 premiers mètres de l’excavation, avec une influence forte de la paroi moulée du puits.
Ce travail a également permis d’évaluer l’effet du renforcement du front de taille par le boulonnage, avec une réduction de l’ordre de 10 % des déplacements.
Jean-Luc Piljan
Ingénieur en génie civil
Systra
GÉOTECHNIQUE FORAGE FONDATIONS FORAGE D'EAU ESSAIS
M² EXPOSITION INTÉRIEURE
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