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INGÉNIEUR GÉOTECHNIQUE : UNE PROFESSION QUI A DE L'AVENIR - <p>Michel Khatib, directeur technique et<br />innovation au sein du groupe Ginger et<br />président du bureau géotechnique de<br />Syntec Ingénierie déplore le manque<br />d’ingénieurs.</p>
18/04/2024

INGÉNIEUR GÉOTECHNIQUE : UNE PROFESSION QUI A DE L'AVENIR


L’ingénierie géotechnique est indispensable pour tous les projets, ce qui en fait un métier riche.
Les formations d’ingénieurs sont en nombre insuffisant pourrépondre aux besoins de la profession.

Le secteur de la géotechnique recrute. Toutefois, les entreprises déplorent le manque de candidats, mais aussi de formations d’ingénieurs pourtant indispensables.
Michel Khatib, directeur technique et innovation au sein du groupe Ginger et président du bureau géotechnique de Syntec Ingénierie évoque avec nous cette problématique,
les solutions mises en place par la profession et l’évolution du métier, avec notamment l’arrivée de l’intelligence artificielle.

Pour Michel Khatib, le constat est sans appel : les formations d’ingénieurs sont trop peu nombreuses en France. « Nous sommes face à une double problématique : d’une part, on ne forme que peu d’ingénieurs chaque année, et, d’autre part, c’est un métier qui souffre d’une image tronquée et qui n’attire donc pas assez de candidats chaque année », déplore-t-il. À titre d’exemple, les 4 principales écoles d’ingénieurs en géotechnique forment chaque année une vingtaine d’étudiants chacune.
« Uniquement au sein du groupe Ginger, nous pourrions tous les recruter chaque année et ce ne serait encore pas suffisant ! Et puis, nous ne sommes pas seuls sur le marché. Cela fait de nombreuses années que nous sommes confrontés à cette problématique et que, avec Syntec Ingénierie, nous alertons le gouvernement. » D’une manière générale, chaque année 40 000 ingénieurs sont formés sur le territoire, tandis que les besoins évalués se situent entre 50 000 et 60 000, comme l’indique l’étude Dares / France Stratégie menée en mars 2022.


DES CANDIDATS PEU NOMBREUX


En effet, de nombreuses entreprises tentent de recruter des ingénieurs pour accompagner leur développement.
Comme le démontrait le rapport annuel de branche réalisé par Syntec Ingénierie en 2023, 26 % des répondants souhaitaient recruter dans les 6 prochains mois et principalement sur des postes
d’ingénieurs ou de chargés d’études techniques. Face au manque de candidats, certaines se tournent vers des jeunes issus de formations universitaires.
« Certaines universités disposent de modules en géotechnique, mais cela reste assez généraliste et les jeunes diplômés n’ont pas ces formations appliquées qui permettent d’avoir les compétences techniques essentielles en entreprise », poursuit Michel Khatib.
L’autre option choisie également pour pallier ce manque de collaborateurs est de recruter des jeunes en provenance de l’étranger. « C’est bien aussi, mais le problème c’est qu’en agissant de la sorte plutôt qu’en formant sur notre territoire, nous affaiblissons les capacités en ingénierie dans les pays en question ainsi que notre souveraineté en matière de formation. De plus, nous nous privons d’un vivier de chercheurs et d’innovation. » Des propos confirmés par le rapport annuel 2023 qui indiquait que,
malgré les besoins manifestés, trouver un profil adapté à son besoin n’était pas chose facile dans le secteur puisque 60 % estimaient avoir des difficultés à trouver les profils adaptés à leurs besoins (seulement 7 % trouvent cela facile). Ainsi, en termes de formation, la priorité est mise sur le développement de la formation en interne (73 %).

 

UNE FORMATION APPLIQUÉE GRÂCE AU TUTORAT


Pour compenser ce manque de nouveaux collaborateurs, le groupe Ginger forme chaque année de nouveaux ingénieurs en interne grâce à une pépinière et une formation basée sur le tutorat.
« Nous avons constaté que beaucoup d’universitaires sortaient avec un bac+5, mais se retrouvaient en difficulté pour trouver un emploi, notamment des géologues. Avec notre pépinière, non seulement nous satisfaisons un besoin, mais, en outre, nous leur apportons un emploi. Et puis, nous rentabilisons ainsi une formation universitaire payée par nos impôts. » Ainsi, depuis 3 ans, grâce au tutorat, une dizaine de personnes sont formées chaque année au sein du groupe, puis embauchées en CDI. « Le
problème des formations universitaires, c’est que ce ne sont pas des formations métiers appliquées. Nous compensons donc ce point à notre niveau. » Une solution alternative qui n’est cependant pas complètement satisfaisante. Pour Michel Khatib, il serait important de lancer une grande réforme des programmes universitaires pour les professionnaliser davantage. « Il y a un manque d’ingénieurs,
mais pas seulement : il manque des écoles appliquées, des formations réellement professionnalisantes », constate-t-il.
Et, pour le spécialiste, il faudrait également redévelopper l’esprit scientifique qui manque cruellement aujourd’hui. « Mais cela se fait dès le plus jeune âge, dès la primaire et le collège. »
C’est donc le système éducatif complet qu’il faudrait revoir.

 

REVALORISER LA PROFESSION


Toutefois, même si les écoles parvenaient à former d’avantages d’ingénieurs chaque année, « ce qui est compliqué à mettre en place », concède Michel Khatib, il faudrait aussi attirer des profils plus nombreux en sortie de lycée. « Aujourd’hui, le métier d’ingénieur souffre de son image, perçue comme trop complexe. Nous devons redonner envie aux jeunes. C’est un métier passionnant et d’avenir, dans lequel on peut faire carrière. »
En effet, derrière chaque projet de construction d’aménagement, quel qu’il soit, il y a besoin d’ingénieurs géotechniciens. Et puis, c’est un métier utile et qui a du sens ! « Certains jeunes peuvent être attirés par une carrière plus facile comme Youtubeur, mais probablement moins pérenne. Et puis, est-ce qu’ils savent que pour stocker leurs données il faut des data centers qui, pour être bâtis, auront besoin d’une étude géotechnique ? », interroge Michel Khatib. Le métier d’ingénieur
lui apporte une garantie de carrière. C’est un métier qui recrute et qui a du sens. « Aujourd’hui
sans doute encore plus qu’hier avec le dérèglement climatique, nos professions sont indispensables. Qu’il s’agisse de gérer les impacts des épisodes de sécheresse ou ceux de crues.
Quel que soit le projet, du bâti d’une maison à la construction d’un ouvrage exceptionnel, en passant par la réalisation d’un tramway ou autre, l’étude du sol et de l’impact de cet ouvrage sera indispensable. C’est un travail qui apporte une grande satisfaction, utile pour la société. Je pense que l’on peut parler de “vocation”. »


UN MÉTIER MENACÉ PAR L’IA ?


Si certains pensent que l’intelligence artificielle pourrait venir remplacer les ingénieurs dans les années à venir, Michel Kathib n’en est nullement convaincu. « Dans les années 1960-70, on pensait que les ordinateurs prendraient la place des ingénieurs ; cela n’a nullement été le cas : au contraire, les besoins en ingénieurs ont augmenté ! Par contre, ils ont allégé des tâches, notamment toutes celles que l’on réalisait sur papier.
Les ordinateurs ont automatisé ces tâches fastidieuses. » Et la même chose devrait se produire avec l’IA selon le spécialiste. « L’intelligence artificielle va être un assistant qui va se charger des tâches consommatrices de temps et de préparer les livrables. Elle va être une aide précieuse, mais ne remplacera pas les ingénieurs qui devront d’ailleurs l’alimenter correctement.
Les données que l’on va entrer devront être sélectionnées avec choix pour que le résultat soit probant. » Aussi, il est essentiel de conserver un esprit critique et scientifique. « Nous disposons aujourd’hui de beaucoup de données et cela va augmenter dans les années à venir. Il est donc primordial de sélectionner celles qui seront pertinentes et de conserver un esprit critique quant au résultat qui sera transmis par l’intelligence artificielle, de sorte que ce soit cohérent avec les besoins du client. » Pour le spécialiste, le scientifique doit challenger les résultats et les données pour arriver vers le probable.
« L’intelligence artificielle va être une assistante remarquable à condition de pouvoir la dompter. »

 

FORMER DAVANTAGE AUX SCIENCES HUMAINES


Ce temps précieux gagné grâce à l’intelligence artificielle permettra de se consacrer davantage aux relations humaines capitales pour la réussite des projets. « Il est essentiel que les ingénieurs d’affaires soient bien à l’écoute de leurs clients. Chaque projet est unique selon les attendus de chacun. L’empathie est donc une qualité essentielle pour concevoir les projets. L’humain doit impérativement être pris en compte. C’est pourquoi il est essentiel que les formations disposent de modules de
sciences humaines et permettent de développer l’empathie. »
Les ingénieurs doivent être capables d’entendre les besoins, mais aussi de collaborer avec leurs confrères pour une réussite totale des chantiers. « Ils ont un rôle de chef d’orchestre qui nécessite de grandes compétences humaines », conclut Michel Khatib.


Maylis Roizard


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